lundi 4 novembre 2013
"LE FOND DE L'AIR EST ROUGE" de CHRIS MARKER (1977): SPLENDEURS ET MISERES D'UNE BELLE ILLUSION.
La traversée du XX° siècle, c'est aussi, et peut-être d'abord celui de la tentation révolutionnaire planétaire. Dès son avènement en 1917, l'eschatologie communiste conjugue action et représentation, action politique et "agir" symbolique; la Révolution, c'est les Soviets et le suprématisme! Le temps des révolutions du XX° siècle est inséparable de l'affirmation de l'image comme support de cette action, puis de l'image autonomisée par l'usage des temps, autrement dit, l'icône. A mesure que le temps passe, ces images, tout en conservant une partie de leur charge symbolique originelle constituent, pour les successeurs de ceux qui leurs furent contemporaines, une référence à la fois identique et différente, dilatées par l'épaisseur toujours plus grande du matériau historique et des référentiels nouveaux que leur présence suscite. On ne sait plus alors tout-à-fait ce qu'est l'Histoire: une avancée humaine dans le Temps ou un voyage dans ses représentations. WALTER BENJAMIN s'inquiétait du destin de l'oeuvre d'art à "l'heure de sa reproduction technique". Avec CHRIS MARKER, on s'interroge ici sur l'action humaine à l'heure de ses représentations cinématographiques. Mais "Le fond de l'air est rouge" s'interroge aussi, du Paris des années 1960 au Prague de 1968, du Cuba de 1967 au Chili de 1973, sur la destinée des révolutions au moment de leurs institutionnalisations . Façon de regarder en face,et les "Grandes espérances" et "Les illusions perdues", comme le fait au même moment MARCEL OPHULS dans "Le chagrin et la pitié" (1971),en radioscopant postures et représentations des années de Vichy ,ou HARRIS ET SEDOUY traquant les "Passions françaises" dans "Français si vous saviez"(1970), dans un style plus classique. MARKER entend en effet diffracter ses images dans l'accélération syncopée et les sonorités, musicales ou publicitaires, d'un dernier quart du XX° siècle où les jeunes "enragés" conjuguent Guevara et les Rolling Stones, le Cuirassé Potemkine et la modernité. Son travaille de documentariste n'est pas sans évoquer les "collages" textuels du DOS PASSOS de" Manhattan Transfer", au moment où la peinture contemporaine ,un peu lassée des formalismes du cubisme, oscille entre "Action Painting" et "Expressionnisme abstrait". Un cinéma total pour un siècle...total.
Olivier Milza de Cadenet.
Partie 1: "Les mains fragiles"
Naissance et affirmation de l'illusion lyrique ou comment la Révolution devrait demeurer dans l'enfance de son art.
Partie 2: "Les mains coupées"
L'institutionnalisation de l'utopie.
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